Après le nom retenu pour la gourde digitale en Haïti, les responsables de la Banque de la République d’Haïti (BRH) mettent le cap sur la désignation d’un logo pour accompagner le nom mais aussi sur l’inclusion de cette monnaie numérique dans l’écosystème économique nationale.

Depuis le 5 avril, un concours est lancé pour trouver un logo qui marche avec la « BitKòb », le nom officiel retenu pour la gourde digitale haïtienne.

Cette monnaie numérique, bientôt intégrée dans l’écosystème de paiement national, attire déjà des commentaires autour de ses effets positifs et de ses potentielles conséquences négatives sur l’économie nationale.

« La mise en circulation d’une Gourde Digitale s’inscrit dans le prolongement des actions visant à accompagner et orienter le développement de l’économie numérique en Haïti » a déclaré le Gouverneur de la Banque de la République d’Haïti, (BRH), Jean Baden Dubois, lors de la cérémonie d’ouverture de la foire/exposition de la mode le 27 janvier 2021.

« La BRH compte offrir un moyen de paiement plus sécuritaire (surtout en cas de catastrophes naturelles), accessible sur tout le territoire national et circulant sur un support permettant d’éliminer la dépendance à l’énergie et au réseau internet », a ajouté le numéro 1de la banque des banques.

Ce n’est pas le chroniqueur économique Riphard Serent qui dira le contraire. « Il s’agit, pour la banque centrale, de réduire de manière considérable, et à long terme, les coûts liés aux impressions de billets de banque, cela permettrait aussi à la Banque d’avoir un meilleur contrôle de la masse monétaire afin de mieux articuler la conduite de la Politique Monétaire », a expliqué l’économiste.

Honor Luders gagnant du concours de nom lancée par la BRH. Crédit Photo Thimoté Jackson

Contrecarrer le faux et usage de faux

« La gourde digitale résoudra le problème de faux billets, de billets abîmés. Elle facilitera les transactions entre offreurs et demandeurs. La ‘’Bitkòk’’ rendra plus facile les transferts d’argents à partir d’un téléphone ordinaire ou un smartphone ou autre gadget électronique permettant d’’effectuer des transactions a de tels effets », a informé l’économiste et journaliste, Serent.

Il convient également de souligner, selon le chroniqueur de la radio vision 2000, la monnaie virtuelle de la BRH évitera aux commerçants et entrepreneurs de victimes de braquages parce qu’ils n’auront plus du cash à manipuler. Un problème de sécurité qui sera à moitié résolu dans un pays ou le vol à main armée est une infraction courante.

Parallèlement, selon le spécialiste de l’économie : « La gourde digitale favorisera une augmentation du volume des transactions dans l’économie haïtienne, le développement de la Fintech au niveau local et par ricochet la création de nouveaux emplois ».

Toutefois, cela n’empêche pas aux hommes et femmes de chiffres d’avoir certaines réserves sur la Bitkòb en tant que monnaie digitale.

Le gouverneur de la BRH, Jean Baden Dubois, une partie du staff de la BRH ainsi que les lauréats du concours de Nom pour la monnaie digitale haïtienne. Crédit Photo : Thimoté Jackson

Des inquiétudes liées à l’inclusion financières

« À priori, une monnaie digitale ne peut concerner, dans un pays comme le nôtre, qu’une minorité de la population. Si l’objectif est toutefois d’intéresser la minorité ayant accès à l’Internet et aux téléphones intelligents, en espérant que cette fraction grandisse au fil du temps, alors les perspectives pourraient être intéressantes pour l’avenir » a analysé l’économiste Pierre Mary Boisson qui n’est pas le seul à exprimer ses préoccupations autour de la gourde digitale.

L’économiste Riphard Serent a lui aussi exprimé quelques réserves. « La Bitbòk pourrait constituer un manque à gagner pour les banques commerciales. Les petites bourses préféreraient garder leur argent sur un portefeuille numérique au lieu de les déposer dans un compte en banque » selon l’avis de M Serent. Toutefois, il précise : « La définition d’un barème pour qu’il y ait une limite pour les portefeuilles numériques serait une bonne décision puisqu’il permettrait aux clients de garder les gros montants à la banque ».

Quoique avantageux, il est un fait que l’introduction de la gourde digitale sur le marché haïtien interviendra dans un écosystème économique ne disposant, d’une part, de loi sur le commerce électronique et d’autre part, peu de citoyens et d’utilisateurs ont accès à l’énergie électrique à travers le territoire.

En raison de ces manques préalables, certains doutent que la gourde digitale constitue un mécanisme d’inclusion de la grande majorité de la population, pour d’autres certaines interrogations légitimes préoccupent déjà. Comment la BitKòb va-t-elle être utilisée ? Avec quel système d’énergie ? Pour quelle quantité de citoyens ?

Jean Allens Macajoux