Quoique controversée, la viande de cheval est de plus en plus appréciée en Haïti. Des haïtiens  manifestent le désir de l’introduire dans leur gastronomie. Dans un appel à témoignages, les consommateurs de la viande de cet animal domestique ont brisé la glace. Plusieurs interviewés n’ont pas tari d’éloges sur la sapidité de cette viande rouge. En Haïti, certaines régions comme l’Artibonite et Léogane sont réputées pour la consommation de la viande de cheval.

L’essayer, c’est l’adopter ?

Woodline Cherimond, 28 ans, physique imposante, son sac de provision accroché sur son épaule droit, un peu essoufflée, la jeune dame vient à peine de faire ses emplettes. Elle a préféré la viande de cheval à celle du bœuf qu’elle consommait habituellement jadis. En effet, depuis 2014, Woodline mange la viande de cheval et l’affectionne. Elle raconte l’avoir goûtée pour la première fois à Gressier, commune de Port-au- Prince, située à 19km. La native de Port-au-Prince n’est pas prête à oublier ce jour :  » Je me rendais à une journée de mer à Gressier, j’avais un peu faim et c’est alors que j’ai repéré une  barque de friture, mais j’ai surtout été attirée par une viande rouge qui m’a tapée à l’œil », raconte celle qui fait presqu’un mètre 80.

Curieuse, Mlle Woodline n’a pas pu résister à l’envie de goûter la chair, elle a demandé alors à son ex-petit ami de l’époque de lui en apporter. « Ce qui est marrant dans l’histoire,  dit-elle, arborant un large sourire, c’est que ma mère avait juré de n’en jamais goûter, même pas une pincée, vue l’utilisation faite de l’animal domestique. Mais ce jour-là, ma mère l’a ingurgitée goulument, et ceci à portion égale avec moi  », explique la jeune dame au teint clair.

Woodline Cherimond est loin d’être la seule. Jean Luc Dufresne est lui aussi un consommateur avéré de la viande de cheval. Pourtant, contrairement à plusieurs cultures européennes, dans la gastronomie haïtienne on ne consomme pas de viande chevaline à cause de plusieurs restrictions. C’est la raison pour laquelle presque toutes les personnes interrogées à ce sujet avouent avoir gouté cette viande par curiosité.

Jean Luc, par exemple, l’a récemment consommée à Ouanaminthe, un arrondissement du département du Nord-est. « J’ai toujours entendu parler de la viande de cheval et de sa saveur ».

Au nom de l’endurance sexuelle      

Ce n’est pas superflu. La viande chevaline aide effectivement à améliorer son endurance sexuelle. Des recherches scientifiques avèrent que cette  viande est riche en fer. Du coup, elle aide à la formation des globules rouges et lutte contre l’anémie.

« On le sait tous, c’est une quantité importante de sang qui engendre la concentration du pénis », rappelle un médecin. Et c’est l’une des raisons ayant poussé  Dufresne à la découvrir. Mais à Port-au-Prince, c’était difficile d’en trouver », explique le journaliste multimédia. « A Ouanaminthe, la marchande a vanté à tue-tête les bienfaits de cette viande arguant qu’elle renforce l’endurance sexuelle », ajoute Monsieur Dufresne d’un ton blagueur.

Le côté désavantageux

C’est comme le revers de la médaille. La viande de cheval est l’une des viandes rouges les plus fragiles, a précisé une recherche. Elle s’oxyde à l’air très rapidement à cause de sa forte teneur en fer. Selon les spécialistes, la viande crue ne peut être conservée que pendant 3 jours, au maximum. Pour une conservation plus longue, il faut la mettre dans un sachet hermétique et la garder dans un congélateur. Alors qu’après cuisson il est conseillé de la manger pendant les 2 jours qui suivent.

Les experts ajoutent qu’on doit cependant la décongeler en la plaçant au réfrigérateur pour éviter le changement brutal de température. La viande hachée, quant à elle, doit être consommée dans la même journée. Fort de tout cela, il serait de bon ton et important de se questionner avant de consommer la viande de cheval quelque part.

Contacté dans le cadre de ce travail, Jean Sainfort Monnazard, agent de santé communautaire et vétérinaire, a placé son mot. Il dit déconseiller à tous la consommation de cette viande. Le diplômé de l’AG Horizon, une école vétérinaire à Verrettes, a évoqué plusieurs raisons. D’abord, la domesticité de l’animal. Ce n’est pas recommandé, tout simplement, de consommer les animaux domestiques. Ensuite, M. Monnazard a précisé que ces animaux sont à fort risque d’attraper le tétanos. Si, par malheur, on arrive à consommer cette viande alors que l’animal était infecté, cela peut vous coûter la vie.

Junior Luc