Au cours de la traversée vers l’Amérique en 2021, l’Organisation Internationale pour les migrations (OIM) dit avoir enregistré plus de 1 238 cas de décès. 728 d’entre eux sont survenus directement à la frontière entre les États-Unis et le Mexique. Sur les 728, 90 Haïtiens sont morts sans avoir un lieu de recueillement ou proches et familles peuvent se recueillir sur leur tombes.

À la question du journaliste Marc-Evens Lebrun : « Que fait-on des corps des migrants qui sont morts lors de la traversée de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique ? », la cheffe du commandement du secteur d’El Paso depuis mars 2020, la Cheffe Gloria Chávez a répondu que : « Dans ces genres de cas, la Border Patrol coordonne avec des médecins légistes, ils vérifient les corps, les emportent pour pouvoir les examiner. Si après les études en laboratoires des moyens d’identifications ont été retrouvés, nous rentrons directement en contact avec le consulat du pays d’origine du migrant pour qu’ils puissent nous aider à retrouver les proches et parents de la personne décédée dans son pays d’origine » explique celle qui dirige toutes les opérations d’application de la loi de la patrouille frontalière le long de 264 milles frontaliers avec le Mexique.

Dans le cas contraire, les restes sont incinérés aux États-Unis…

Gloria I. Chavez qui a pris le commandement du secteur d’El Paso en mars 2020, en tant qu’agent de patrouille en chef, souligne que des experts assez compètent font de leurs mieux pour pouvoir identifier les corps découverts avec des matériels sophistiqués, si ces derniers ne portent pas sur eux, des pièces d’identité.

Effectivement, dans les différents points frontaliers, les obstacles rencontrés par les migrants ont souvent pour finalité la mort. Les Cartels de drogues du Mexique tuent, el rio grande tuent, les animaux sauvages du désert notamment les serpents tuent, la chaleur et l’épuisement,… tuent.

L’Organisation Internationale pour les migrations (OIM), à travers son projet Migrants Disparus (MMP) a enregistré le nombre de 1 238 personnes qui ont perdu la vie au cours de leur migration à travers les Amérique en 2021. Ce rapport préparé et présenté par Edwin Guillermo Viales Mora, pointe du doigt les décès de migrants dans les Amérique en 2021. Parmi cet effectif, funeste 51 mineurs sont enregistrés. Ce qui d’après l’OIM fait de la frontière américano-mexicaine « le passage terrestre le plus meurtrier au monde ».

Photo d’illustration de migrants qui ont perdu la vie au Texas (Laredo) en tentant de rentrer aux Etats-Unis

Haïti en 3e sur l’échelon des morts….

Selon les statistiques publiées par l’OIM, le nombre de morts non-identifiés demeurent la quantité la plus élevée en fonction des catégories avec plus 500 cadavres, puisque, en dépit de l’ingéniosité des agents de Border Patrol et leurs dispositifs scientifiques, nombreux ont été les corps sur lesquels on ne trouve aucune pièce ou aucune trace d’identité. Mais aussi, des corps en putréfaction ou des squelettes que les médecins légistes du Texas peinent à identifier.

« Parfois, ils nous arrivent de découvrir des squelettes et les carcasses des corps sans vie dans le secteur de Laredo sans pouvoir identifier les personnes. Je suis sûre qu’il y a des morts (cadavres) dans le désert que nos équipes peinent à découvrir ou ne découvrirons jamais » raconte l’agent frontalier Burwell. « Le désert est immense, nous ne voyons pas toute l’étendue de la rivière (ndlr Rio Grande). Nous ne pouvons pas voir tous ceux et celles qui traversent la frontière faute d’une couverture totale du secteur en caméra de surveillance » ajoute-t-il.

Cependant, le classement par pays en quantité de personnes décédés par l’OIM place en 2021, les Vénézuéliens au premier rang avec 136 ressortissants ; les cubains en deuxième position avec 108 ressortissants et ensuite les Haïtiens avec 90 ressortissants morts et identifiés.

Selon Viales auteur du rapport, il y a de quoi à s’inquiéter puisque les cas de décès sont en nette augmentation.

« Nos données montrent la crise croissante des décès pendant la migration dans la région, et la nécessité de renforcer les capacités médico-légales des autorités pour identifier les décès le long de ces routes. Nous ne pouvons pas oublier que chaque numéro est un être humain avec une famille qui ne saura peut-être jamais ce qui lui est arrivé »

rappelé le cadre de l’OIM.

El Paso, Laredo, là ou des cadavres étonnent

En présentant son rapport avec à ses côtés les quelques officiers tels ; Jimenez, Jordan Crespo ; Semlendez ; Miss Valdez le commandant Burwell a livré des statistiques préoccupantes sur les migrants qui traversent la frontière. « Dans le secteur de Laredo nous retrouvons des corps sans vie beaucoup plus dans les ranches. Nous avons repéré 51 cadavres. Dans la quantité de des décès (51 morts) 80 % environ ont été des Mexicains et les autres 20% ont été des étrangers. Mais là encore n’est pas le souci. Notre secteur couvre plus de 180 mille mètres au cœur de la frontière. Nous imaginons qu’il est probable que nous ne trouvons pas d’autres corps des personnes qui sont pourtant décédés » regrette l’officier tiré à quatre épingles dans son uniforme de Texan vert.

L’officier qui rappelle avoir vu assez des scènes traumatisantes au cœur de cette nature sauvage dit qu’il aurait préféré qu’il n’y pas d’incidents proches de la mort. « Nous ne souhaitons la mort de personnes ici, cela nous arrangerait beaucoup plus s’il n’y a jamais eu de mort, car comme nous, les migrants sont des êtres humains faites de chairs et de sang ».

Selon les données de la Border Patrol, au cours de l’année fiscale 2021 (du 1er octobre 2020 au 30 septembre 2021), 39 migrants sont morts dans le secteur d’El Paso, alors que d’octobre de l’année dernière à juin de cette année, il y avait déjà 37 vies perdues dans leur tentative d’atteindre les États-Unis par cette région.

Photo d’illustration de migrants qui ont perdu la vie au Texas (Laredo) en tentant de rentrer aux Etats-Unis

Rappelons qu’en avril 2022, la conférence régionale sur les migrations (CRM) a souligné, dans une déclaration extraordinaire, l’importance de sauver des vies. Ce par le biais de la mise en place d’efforts internationaux coordonnés. L’Assemblée générale des Nations unies a aussi pour sa part, lors du Forum international d’évaluation des migrations (IMRF), réaffirmé la responsabilité collective de préserver la vie de tous les migrants et de prendre des mesures pour empêcher la mort des personnes en déplacement.

Marc-Evens Lebrun