Décryptage | À quoi sert réellement le passeport CC de la Communauté Caribbean ?
Depuis avril 2018, il est inscrit en lettre capital d’imprimerie la mention CC sur le passeport haïtien, réaffirmant le statut d’Haïti comme étant un membre à part entière de la Communauté des Caraïbes (CARICOM). Ainsi, au regard des dispositions prescrites dans les articles 45 et 46 du traité de Chaguaramas révisé concernant la libre circulation des ressortissants des États membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), le nouveau passeport haïtien devait permettre la libre circulation des citoyens dans la région sans avoir besoin d’un visa, en théorie…
Quid de la CARICOM
La CARICOM ; Communauté Caribéenne, est née sous l’auspice du Traité de Chaguaramas, le 4 juillet 1973, avec pour objectif de renforcer les liens entre les États de la zone.
De 4 membres à l’origine, l’organisation en compte 15 aujourd’hui dont Haïti qui depuis déjà 49 ans (1973-2022) fait l’expérience d’intégration régionale. Le traité consacre la création du « Marché Unique de la CARICOM » qui contient des dispositions relatives à l’intégration économique dont la mise en pratique est prévue par la révision de 2001 du Traité de Chaguaramas
Ainsi, on est aujourd’hui sous l’égide du traité de Chaguaramas révisé qui a été signé et ratifié par l’intégralité des États membres de la CARICOM. Le traité repose surtout sur le CSME (Caribbean Single Market and Economy) qui est un régime créé en vertu des dispositions du traité de Chaguaramas de 1973 et qui remplace les chapitres 3 à 7 de l’annexe instituant la Communauté et le Marché commun des Caraïbes.
Mais dans le cadre du traité révisé de Chaguaramas établissant le Marché et l’économie unique de la Caraïbe (CSME), des mesures devaient être prises pour rendre effective la libre circulation énoncée dans son article 45 pour « les ressortissants des États membres au sein de la Communauté ». Ainsi, Cinq catégories de ressortissants pourraient être absorbées à cet effet : les diplômés d’université, les travailleurs du secteur des médias, les sportifs, les artistes et les musiciens. Pour cela, les États membres sont tenus, selon le paragraphe 2 de l’article 46, d’établir les arrangements juridiques, administratifs et procéduraux appropriés pour faciliter la circulation de ces « personnes qualifiées […] vers et sur leur territoire sans harcèlement ni imposition d’obstacles ». L’article préconise aussi la suppression de l’obligation de passeports et de permis de travail. En effet, la libre circulation des facteurs de production (personnes et capitaux) est un facteur de compétitivité pour la région car l’offre d’emploi augmenterait ainsi qu’une partie de la demande d’emploi en Haïti que constituent nos jeunes.
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— CARICOM Secretariat (@CARICOMorg) July 4, 2022
Une théorie pour plusieurs réalités
Cependant l’on constate que, même appartenant à la catégorie des « personnes qualifiées », les haïtiens qui veulent voyager dans les autres pays de la CARICOM se doit, pour bénéficier d’une exemption de visa, d’être détenteur d’un passeport diplomatique ou officiel. À défaut d’être munis de ces documents précités, il faut que l’Haïtien (ienne) en question soit un homme ou une femme d’affaires dont le passeport ordinaire est munie d’un visa américain, canadien ou Schengen. Une situation jugée « discriminatoire et dérogatoire aux articles 45 et 46 du Traité de Chaguaramas révisé » par plusieurs juriste dont l’avocat Samson Beucia, avocat au barreau de Port-au-Prince.
D’après le membre de la basoche :
« La signature d’un traité ne rend pas spontanée la jouissance des avantages d’un marché commun. D’autres efforts doivent être consentis par les états signataires du traité afin de faciliter son applicabilité ».
Dans le cas d’Haïti, il incombe aux dirigeants d’assurer un climat de stabilité politique mais aussi de tendre vers une modernisation économique.
Même s’il il faut reconnaître que nombreux sont les leviers d’intégration qui sont à leur stade de balbutiement ou encore sont à un stade de projet, on pourrait prendre à titre d’exemple : une (ou des) union (s) politique (s), la fusion des lignes aériennes, une union monétaire, une bourse régionale entre autres.
Par ailleurs, des accords multilatéraux entre la Communauté des Caraïbes et d’autres pays constitue une aubaine pour les membres cette communauté », par exemple, des accords de libre-échange et commerciaux avec des organisations internationales et avec d’autres pays profitent à des pays membres de la CARICOM.
Marc-Evens Lebrun