L’un des poumons de l’Amérique, Forêts des Pins, victime d’incendie malveillant
Plus de 160 hectares de la forêt sont déjà dévastés sur les 12 924 restants, selon les dernières estimations des agents forestiers de la zone. Depuis pratiquement 3 semaines, les gardes forestiers n’ont pas la vie tranquille à Forêts des Pins. Jusqu’à cette troisième semaine du mois de mars, ils sont encore en guerre contre les incendies d’origine malveillante. Interpellés par des images des pinus en feu, nous nous rendons à cette province du département de l’Ouest afin de démêler le vrai du faux.
A en croire l’agent BSAP interviewé, c’est depuis le 15 janvier 2023 que la forêt s’embrase, à un degré moindre, bien entendu. Mais, depuis 3 semaines des feux s’intensifient et disséminent partout. Selon des sources concordantes, ces incendies seraient l’œuvre des personnes arrêtées au pied des pins voulant les abattre à tout prix à des fins agricoles. Pour recouvrer leur liberté, les gardes forestiers les auraient exigé une somme. Frustrés, ces anciens incarcérés auraient mis le feu à la forêt. Déjà confronté à un manque de matériel révoltant, les agents ont estimé que ces embrasements ça et là viennent augmenter leur peine.
Importance et présentation de la forêt
A côté des étendues d’eau à savoir des mers et des océans, une forêt constitue l’un des réservoirs de carbone les plus importants de la planète. Le rôle qu’elle joue dans la protection de l’environnement est non négligeable. Grosso modo, les forêts assurent une fonction centrale contre le changement climatique, en absorbant les gaz à effets de serre (GES) et en renforçant la résilience des paysages. Donc, ce ne sera pas fortuit si on part tous pour sauvegarder nos forêts.
En Haïti par exemple, chaque habitant à l’impérieuse obligation de restaurer la Forêt des pins. Car, elle fait partie des patrimoines mondiaux, selon Jean Robert Sultan. Elle libère, à elle seule, près de 15 % d’oxygène contre 20% de la forêt Amazonienne au Brésil.
Située à environ 2 000 mètres d’altitude dans le massif de la Selle, forêt de pins s’étend de part et d’autre de la frontière entre Haïti et la République dominicaine. De très souvent et presque chaque année d’ailleurs, des feux s’éclatent dans la forêt, du côté haïtien. Le Ministère de l’Environnement évoque la litière des brindilles de feuilles mortes et d’herbes. Ces derniers sont, selon ce qu’il laisse croire, donc propices à des incendies.
Bonjou!
— Jean Jacques Dessalines ✊🏾🇭🇹 (@JeanJacquesDes7) January 23, 2022
📷Forets des Pins, Haiti 🇭🇹 pic.twitter.com/dAskVHa4di
De la volonté pour sauver la forêt
« Ces plusieurs centaines de pins étant parties en flammes m’ont écœuré », a lâché avec amertume, Walmy Ulysse. Cet incendie déclaré à Forêts des Pins a révolté plusieurs membres de la communauté. Au point que, le dimanche 05 mars, une rencontre a été organisée pour sensibiliser une partie de la population sur les enjeux des incendies dans la forêt.
La gorge nouée et la voix pleine de chagrin, le leader de ce rassemblement, Jean Robert Sultan, dit chercher à comprendre le pourquoi d’une action si maladroite de la part de quelqu’un. Lors de son intervention, le responsable de la Fondation Reboisement par Education revient sur le fait que la forêt est considérée comme l’un des patrimoines mondiaux. « Lorsque vous détruisez, de manière criminelle, les pins, vous avez détruit la raison qui avait suscité une telle déclaration et vous avez aussi détruit votre vie », a-t-il martelé. « Il me semble que vous avez oublié l’inondation à Fond-Verrettes en 2004 », se demande-t-il.
Pour cette rencontre, un effectif assez intéressant a été mobilisé. Élèves, planteurs, jeunes filles et garçons, professeurs, tous ont pris part à ce tête-à-tête. D’une manière symbolique, les participants ont marché sur les cendres. Ils ont constaté les dégâts. Sans langue de bois, certains ont craché leurs frustrations contre les détracteurs. Plus encore, ils ont pris des engagements sous les arbres défrichés par les feux criminels. Ensemble, ils ont signé un pacte moral et concédé à conjurer les éventuels incendies, à remplacer les arbres perdus, donc reboiser la forêt d’ici deux ans. Un élève a même proposé l’installation de caméras de surveillance dans la foret.
Des autorités réagissent, mais à distance
Le vendredi 03 mars, des hauts responsables de l’ANAP, Agence Nationale des Aires Protégées, ont donné une conférence de presse présentant la situation. Jeantel Joseph, le directeur de l’institution, a salué les efforts des habitants de la zone pour avoir prêté main-forte aux agents sur le terrain. De son côté, Cyprien Pierre Richard, responsable des Risques et des Désastres à l’ANAP a vanté le savoir-faire de leur agent tout en reconnaissant le manque criant de matériel auquel ils font face.
Un agent BSAP rencontré au bureau des gardes forestiers à Forêts de Pins, le dimanche 05 Mars, s’est confié à notre rédaction au sujet de leur situation jugée inacceptable. Selon ses dires, ils sont des laissés pour-compte. Car, ils disent quémander des assistances et des matériels depuis des lustres. Pourtant, leur appel est jusqu’à présent sans succès. N’était-ce pas CESAL, une organisation étrangère, ils en seraient totalement impuissants et hébétés face au plus petit des incendies.
Le 21 mars, Journée internationale des forêts, est l’occasion de démontrer la place centrale des forêts dans l’écologie et le changement climatique, et de rappeler leurs importantes retombées économiques, sociales et sanitaires.
Junior Luc