États-Unis : l’indispensable rôle de la Presse contre l’immigration illégale
Sans une presse forte, la lutte contre la désinformation autour de l’immigration aux États-Unis est quasi-impossible. Conscient cet état fait, le Meridian International Center, parie gros sur la presse nationale et internationale à travers son programme d’échanges pour lutter contre l’immigration clandestine.
Aux États-Unis, soixante-onze mille (71 000) journalistes ont été enregistrés, uniquement dans le domaine de la presse écrite en 2008. Depuis, un intérêt particulier s’est manifesté pour les domaines de la presse que ce soit à travers les médias traditionnels que les nouveaux médias.
Le ministère américain du Travail, citant les enquêtes annuelles de l’ASNE, souligne que la presse prend de plus en plus de place, les effectifs des journalistes sont surveillés de près. Et l’Etat de son côté encourage une presse libre tant sur le plan national et international. Et c’est dans ce contexte que le programme d’échanges de Meridian Center à accueilli presqu’une dizaine de journalistes résidents de 9 pays pour pouvoir échanger, comprendre, vivre et travailler sur le terrain des sujets liés à la migration aux États-Unis.
Jaime Monténégro, journaliste guatémaltèque, témoigne de sa stupéfaction par rapport aux risques que les résidents étrangers sont prêts à encourir pour entrer illégalement aux États-Unis. Selon le journaliste ‘’de Emisoras Unidas’’, les risques sont tellement élevés qu’aucune raison, telle qu’elle soit, ne devrait encourager un résident étranger à voyager illégalement pour atteindre le pays de l’Oncle Sam. Et le reporter croit dur comme fer que les journalistes ont un rôle à jouer dans la diffusion des bonnes informations et la divulgation de message clés au profit de tous ceux qui rêvent de voyager aux États- Unis un jour.
« La réalité est complexe, de ce que nous connaissons aujourd’hui, il existe le désert, le mur en fer de la frontière, les cartels de drogue et la patrouille frontalière qui sont autant d’obstacles qu’un migrant doit traverser sur son chemin pour arriver aux États-Unis. Et tous ceux qui veulent migrer, doivent défier ce calvaire qui relève du parcours du combattant, avec les nombreux risques que cela comporte, voire même la mort »,
détaille le journaliste le journaliste de la radio 89.7
Un point de vue qui ne se diffère pas de celui du journaliste Byron de la Cruz du journal ‘’Nuestro Diario’’. Selon le concitoyen de Jaime, les risques sont immenses et le Rio Grande [ndlr, grand fleuve long de 3060 km qui prend sa source dans le Colorado et sert de frontière entre le Mexique et les États-Unis sur plus de 2 018 km] ne pardonne pas.
Bien informer pour mieux former
Selon Jaime il est vraiment difficile d’informer ou de désinformer sur un commerce illégal tel le transfert de personnes, alors qu’il s’agit à tout point de vue d’actes posés par des hors la loi.
Le journaliste précise pour dire qu’« il existe des chaînes bien organisées dans les pays donneurs et receveurs de migrants pour que la migration illégale puisse se produire, alors, ajoute-t-il, c’est presqu’impossible de donner des faits véridiques et vérifiés sur ce mode de transfert opaque ». D’où le rôle et le devoir des journalistes reporters du monde entier de transmettre les meilleures informations pour anticiper sur les arnaques et éviter aux migrants de se faire alpaguer.
Si les informations concernant les motifs de voyage aux Etats-Unis sont disponibles via les différents ambassades et sites internet de l’administration du département d’État Américain, mieux orienter les citoyens est aussi de la responsabilité des journalistes de la presse locale. En tout cas, c’est ce que pense la journaliste expérimentée de Salvador Yolanda. D’après la journaliste, la presse internationale, notamment d’Amérique latine et des Caraïbes, a un rôle à jouer dans l’éducation des migrants qui veulent se rendre aux Etats-Unis. Celle qui souligne qu’il est difficile de contenir la migration irrégulière aux États-Unis repose son affirmation sur deux piliers : premièrement, d’après elle, « les Latino-Américains ne connaissent pas les procédures légales pour migrer de manière ordonnée vers les États-Unis ou demander l’asile à leur pays s’ils sont réellement menacés par leurs gouvernements ». Et ensuite, ajoute la journaliste « ces derniers ne sont pas non plus conscients de l’ampleur des dangers qu’ils encourent sur le chemin des États-Unis, tels que la mort, les enlèvements, les viols et la faim etc ».
Les programmes de coopération : une nécessité
Effectuer des visites à la frontière Américano-Mexicaine avec des journalistes est une bonne chose, les conscientiser sur la situation des migrants l’est encore d’avantage. Et ce n’est pas la journaliste Yolanda qui viendra dire le contraire.
« Je pense que le programme Meridian est très utile pour le journalisme latino-américain parce qu’il nous donne l’occasion de nous informer sur les problèmes qui touchent à la fois les États-Unis et nos pays »,
raconte Yolanda à propos du programme d’échanges de Meridian Center.
En juin dernier ce programme a permis à 9 journalistes professionnels de réaliser des travaux journalistiques à la frontière Américano-Mexicaine. Et Yolanda n’en est pas la seule à croire que les expériences de terrains des journalistes peuvent être un élément pouvant changer la donne.
Pour Jaime, c’est une forme d’invitation à l’engagement. « Je pense que le programme doit être évalué du point de vue qui permet au journaliste de ressentir sur le terrain ce à quoi les migrants sont confrontés dans la réalité », explique Jaime. Selon ce professionnel qui a plus de 10 ans de carrière, le terrain invite les journalistes a une prise de conscience qui peut pousser à l’engagement. Puisque, dit-il, avant d’être des professionnels de la presse, les journalistes sont avant tout des humains.
Le présentateur de radio et télé renchérit: « Raconter les histoires de migrants ou de leurs voyages depuis un bureau n’est pas la même chose que d’être dans le désert devant le mur à des températures ambiantes extrêmes ». Quant à Byron De la Cruz, il croit que l’expérience de Meridian facilite le journaliste à avoir des informations de première main. « C’est un point clé pour les journalistes qui travaillent sur la question du phénomène migratoire, nous pouvons sentir la souffrance des milliers de migrants qui se battent pour un avenir meilleur. Ressentir le climat intense, le désespoir, et observer la vitesse et la force du Rio Grande, ainsi que le mur frontalier, nous permet de mesurer le niveau de besoin et de précarité qui existe dans nos pays », ajoute Byron.
Dire une parole différente que celle des trafiquants …
Les trafiquants, les passeurs, et les cartels (notamment ceux du Mexique) empoignent toujours les migrants dans des arnaques qui coûtent souvent chères. En tout cas c’est ce qu’a expliqué l’officier en chef de la patrouille frontalière de Laredo (Texas), Greg Burwell. Selon l’officier Burwell, des partenariats pour un meilleur accès à l’information sur la migration doit être envisageable. « Je ne rejette pas l’idée de coopération avec les medias étrangers pour qu’il y ait de plus en plus d’informations disponibles pour expliquer les procédures et établir la vérité sur le processus migratoire », ajoute-t-il.
Successivement interviewé, Jaime Montenegro et Byron de la Cruz ont pris l’engagement à leur manière de lutter contre l’immigration illégale dans leurs pays vers les États-Unis mais aussi vers d’autres États. « Je crois que le travail du journaliste est de rendre disponible l’information sur la réalité que représente l’émigration aux États-Unis. Nous ne pouvons pas oublier que migrer est un droit humain et qu’il ne peut être influencé. Le journaliste n’a d’autres choix que d’exposer la réalité, les défis et les risques que cela représente et de mettre cette information à la portée de la population. La décision finale de le faire ou non appartient à celui qui veut migrer ou pas », relativise Jaime Montenegro.
Son compère Delacruz souligne qu’au cours de ces dernières années, il a dû couvrir le problème de la migration et les différents facteurs qui l’affectent, et l’engagement d’informer les guatémaltèques de son pays se poursuit jusqu’à nos jours.
Si pour les deux journalistes guatémaltèques l’engagement est pris pour dire la vérité autour des faits et procédures, pour la journaliste Yolanda ceci est une priorité même au sein du media pour lequel elle travaille. Car souligne-t-elle, « le Salvador a été très touché par la migration, surtout depuis les années 1980, car la guerre civile qui a secoué le Salvador (1980-1992) a beaucoup causé de la migration et de nombreux migrants de la diaspora soutiennent désormais l’économie du pays avec leurs envois de fonds. Plus tard, la migration s’est poursuivie en raison de la criminalité et des actions gangs. Actuellement, la migration se poursuit, principalement pour trois raisons : premièrement, la recherche d’opportunités et le manque de travail ; la sécurité et le regroupement familial ».
Marc-Evens Lebrun